Interview MIKE ESTES (Skynny Molly)
Traduction : Y.Philippot-Degand - Juin 2016
RTJ : Bonjour MIKE, merci de nous accorder cette interview pour Road to Jacksonville webzine consacré
au rock sudiste,
Tout d’abord, j’aimerais revenir sur tes débuts, peux-tu nous rappeler d’où tu viens ?
Mike Estes : Je suis de Williamsburg, Kentucky
RTJ : Ta famille était-elle musicale ? Quels sont les principaux artistes que tu as écoutés ?
Mike Estes : Oui, mon papa jouait un peu de guitare et est vraiment un bon chanteur. En fait, il chante avec moi sur un morceau que j’ai fait pour mon CD solo. Nous avons réalisé un enregistrement totalement différent du classique de Hank Williams Sr "Your Cheatin' Heart". Ma famille du côté de ma grand-mère paternelle était aussi très musicienne. La musique est très importante dans cette partie du sud, et le Kentucky est, bien sûr, "The Bluegrass State" (« L’état du Bluegrass », NdT.).
Ma mère n’était pas une chanteuse, mais elle aimait la musique et était une danseuse d’enfer! La plupart des trucs que nous écoutions était de la « country music »; Hank Williams SR était probablement l’artiste principal. Ma maman avait quelques disques hawaïens vraiment super; elle était de là-bas et elle et mon papa s’étaient rencontrés pendant qu’il était stationné à Pearl Harbor quand il était dans la Navy.
Les disques de Hank et les disques hawaïens avaient en commun beaucoup de lap steel guitare, et il n’y a aucun doute que ça ait eu une grande influence sur moi, et Derek Parnell et moi jouons tous les deux de la lap steel un peu partout sur mon nouveau CD.
RTJ : Par quel instrument as-tu commencé à jouer ? Et quels morceaux ?
Mike Estes : J’ai commencé avec la guitare acoustique de mon père. Les chansons que j’essayais de jouer sortaient du livre d’accords de guitare basiques"Mel Bay". Je devais avoir autour de six ans, et j’ai mis du temps à m’en sortir avec une chanson. J’ai juste appris quelques folk songs dans le livre.
J’ai appris les mêmes accords que tout le monde apprend. Sol, Do et Ré assez vite. Ensuite, je n’ai plus vraiment joué pendant un bon bout de temps. J’ai recommencé à jouer à environ 14 ans, et je suis rentré dans ce qui est appelé maintenant "Classic Rock" et "Southern Rock". Mais j’aimais toujours la bonne Country Music, qui est rare de nos jours. Quand j’ai entendu "Ramblin' Man" par les Allman et ensuite "Sweet Home Alabama" par Skynyrd un ou deux ans après, aucun ne sonnait pour moi véritablement différemment des disques country avec lesquels j’avais grandi, et j’ai été attiré par ce style.
RTJ : Quels ont été tes premiers débuts en groupe, est-ce que c’était au lycée ?
Helen Highwater était-il ton premier groupe ?
D’où venait ce nom ? As-tu des enregistrements de cette époque ? Que jouiez-vous en live ?
Mike Estes : Je suppose que j’avais 16 ans lorsque j’ai intégré mon premier groupe; il s’appelait 100 Proof. Nous jouions des reprises, et probablement un original dont je suis sûr qu’il était vraiment atroce. Nous avons gagné notre "Battle of the Bands" (“Bataille des groupes”, NdT.) locale deux ans de suite. Puis un autre groupe appelé 100 Proof a dit qu’ils allaient nous attaquer en justice pour avoir utilise ce nom, parce qu’ils l’avaient déposé. Nous avons change le nom en Helen Highwater, parce qu’à cette époque, j’avais lié amitié avec Craig Reed, qui travaillait pour le Rossington Collins Band. Le chanteur de 100 Proof et moi avions trouvé un annuaire de Jacksonville, FL et avions decidé de voir si un des gars de Skynyrd était dans les pages. Tu sais la suite, j’ai appelé au numéro du bureau du Rossington Collins Band, et Craig Reed a répondu. Nous avons commence à parler musique et sommes rapidement devenus amis. Je lui ai parlé de l’action en justice de l’autre groupe et que j’avais besoin d’un nouveau nom pour notre groupe. Il a choppé Allen Collins pour une "conférence" par téléphone avec moi, a raconté mon problème à Allen, et Allen a dit "Helen Highwater !". "C’est votre nom !". "Faites avec ça !". Dire que j’étais excité de jouer sous un nom qu’Allen Collins m’avait donné était un total euphémisme. Allen était mon « guitar hero » numéro un ! Helen Highwater a fait une démo de cinq titres. Ce n’était pas très bon…Nous avons ensuite fait un "45T" vinyle qui était un petit peu meilleur. Nous jouions live beaucoup de morceaux de rock sudiste. Skynyrd, Marshall Tucker, CDB, Outlaws, etc.
RTJ : Comment as-tu rencontré Allen Collins qui est devenu un de tes amis ? Est-ce vrai que tu l'as mis KO lors de votre première rencontre ?
Mike Estes : Peu après lui avoir parlé au téléphone, je suis allé en voiture en Floride pour rencontrer Craig, et la première fois que j’ai rencontré Allen, nous avons fini par un match de boxe. Je l’ai cogné au nez, j’ai bien failli le mettre KO, mais il a rétorqué avec un moulinet et il m’a touché à plusieurs reprises. Un match de boxe complètement épique! Je devais avoir 17 ou 18 ans à cette époque. Après le combat, il m’a serré dans ses bras, et à partir de là nous avons été potes. C’est le jour où j’ai aussi rencontré Billy, Leon, Barry Harwood, Derek Hess, et Randall Hall pour la première fois. Nous avons vraiment bien rigolé ce jour-là.
RTJ : Tu as dit qu’il t'avait donné une bande de morceaux de Skynyrd, peux-tu nous en dire plus ? Etait-ce des morceaux de Skynyrd’s First And… Last ?
Allen Collins reste pour moi comme le leader de Skynyrd : à Knebworth 1976 il illumine la scène par sa présence. Peux-tu nous en dire plus sur lui ?
Mike Estes : Je suis revenu chez Allen quelques temps plus tard, le dimanche de Pâques 1983. Je lui ai apporté une bande d'Helen Highwater, et il en a aimé quelques uns de mes morceaux les plus country. Ça m'a VRAIMENT rendu heureux. C'est ce jour-là qu'il m'a montré comment jouer le solo de Freebird. Je passais beaucoup de temps à Jax (Jacksonville, NdT.), alors j'ai fini par déménager là-bas, jouant dans Helen Highwater six nuits par semaine. Allen est venu là où nous jouions, nous a observés, nous a fait faire la première partie d'un show de l'Allen Collins Band sur Jax Beach et nous a beaucoup soutenus. Il a traîné en racontant à tout le monde que j'étais à la tête du “prochain gros truc” de Jacksonville.
Ça a été un super moment de ma vie et je ne l'oublierai jamais. Il m'avait donné une bande de quelques morceaux pas encore sortis qui se sont retrouvés sur "Legend" et d'autres albums. Pourtant, l'album "Legend" ne sonnait pas comme ma bande. Les mixes que j'ai sont bien meilleurs. Allen était un farceur, un mec vraiment marrant qui aimait la comédie, les guitares, les amplis, les jolies filles, mais il pouvait, parfois, être son pire ennemi… surtout quand il était question de boire et conduire. Il a détruit un paquet de bagnoles. J'ai vraiment conduit la bagnole qu'il a détruite dans son dernier accident grave. C'était un grand ami. Il n'arrête pas de me manquer.
RTJ : Comment as-tu rencontré Ed King ? Le vois-tu encore de temps en temps autour d’un verre ?
Comment va-t-il ?
Mike Estes : J'ai aussi rencontré Ed King par l'intermédiaire de Craig Reed. Skynyrd avait un morceau sur lequel ils bossaient et sur lequel personne n'arrivait à trouver des paroles. Il devait figurer sur le disque "Last Rebel". En fait, on l'appelait "Blessing in Disguise" (“Bénédiction déguisée”, NdT.). Craig m'a appelé et m'a dit "Personne dans le groupe n'arrive à lui trouver des paroles. Ecris-les pour eux" C'est ce que j'ai fait. Cela a pris environ 10 minutes. Ce n'était pas si génial, mais c'était assez bon pour retenir l'attention d'Ed, et juste après ça il m'a fait descendre pour quelques jours en avion jusqu'à Orlando où il vivait. Je pense qu'en quelques jours j'ai écrit des paroles pour trois de ses morceaux. Je suis revenu chez moi et j'en ai fait des démos. Ed et moi étions une sacrée bonne équipe pour écrire. Il m'a emmené là où je ne serais jamais allé musicalement. Il m'en a appris un paquet. Nous avons écrit ensemble pendant une bonne année, TOUT le temps! On se foutait de la pendule. Pour être honnête, RIEN n'importait plus pour nous que d'écrire et ensuite enregistrer le résultat. Probablement les meilleurs moments de ma vie. Je n'arrive pas, et de loin, à voir Ed autant que je l'aimerais… Il a surgi avec Sharon et les chiens et il a fait le bœuf avec Skinny Molly dans notre studio l'été dernier. C'était un SUPER moment. Il est aussi sur notre CD "Here for a Good Time", sur un morceau que lui et moi avons écrit il y a 20 ans et qui s'appelle "Make it Easy". Dès que vous entendez sa première note vous savez que c'est lui.
RTJ : Comment as-tu été amené à intégrer Lynyrd Skynyrd ?
Mike Estes : En ce qui concerne mon arrivée dans le groupe, je résidais chez Ed King, et un soir Ed a décidé d'aller rendre une visite à ses enfants à Orlando, après qu'il a déménagé à St Augustine, FL. A cette époque, je vivais quasiment avec lui et Sharon. Bref, Gary m'a appelé chez Ed, m'a demandé si je voulais traîner avec eux et jouer de la guitare et écrire parce qu'Ed devait partir. C'était inhabituel, Gary et moi avions traîné ensemble sur la route avec Skynyrd, alors que je me pointais souvent en tournée avec eux pour écrire des morceaux. Donc, Gary et moi nous sommes retrouvés à boire une bouteille de Booker Nose dans la maison de quelqu'un… je ne me rappelle plus qui… et nous avons commencé à jouer une flopée de morceaux et à boire. Nous avons joué des morceaux de Skynyrd, d'autres morceaux. J'ai joué l'intro de "I Know A Little" pour lui et il m'a demandé de rejoindre le groupe. Honnêtement, nous étions tous les deux pas mal bourrés à ce moment-là mais nous pouvions encore jouer tous les deux. J'ai dit " Dors là-dessus et redemande-moi demain, si tu as encore envie de moi.” Je ne voulais pas le voir se précipiter à prendre une décision qu'il pourrait regretter (rires). Nous sommes retournés chez lui pour cuver. Je me suis levé tôt et je suis retourné chez Ed avec le pick-up de Gary. Je ne voulais pas réveiller Gary avant de partir parce que je savais que son crâne lui ferait aussi mal que le mien. J'ai dû être de retour chez Ed pendant environ dix minutes et je lui ai raconté que Gary voulait que je rejoigne le groupe. Ed a dit "Je savais que ça arriverait" (rires). Ed était vraiment opposé à l'idée, parce qu'il pensait que ça pourrait avoir un effet négatif sur mon écriture musicale. Il avait probablement raison à ce sujet. Au moins en partie.
RTJ : Quels souvenirs gardes-tu de cette période dans l'un des plus grands groupes américains ?
Mike Estes : Je me contenterai de dire que j'ai eu beaucoup d'aide de la part du camp Skynyrd au fil des ans. Craig Reed, Allen Collins, Ed King… Les managers, road managers… J'étais ami avec tout le monde. Quand j'étais dans le groupe, il y avait encore quatre membres originaux qui y jouaient. Bien que je n'aie jamais pensé que le line-up dans lequel j'étais soit aussi bon que le Skynyrd original, il y a eu des moments où c'était fichtrement bien. J'ai beaucoup de bons souvenirs sur l'ensemble de l'expérience. Le meilleur étant probablement ma maman et mon papa venant à un show de Skynyrd et me voyant jouer avec eux, et le groupe dédiant Simple Man à ma maman.
RTJ : Comment se sont passées les premières répétitions ?
Mike Estes : Elles se sont plutôt bien passées, mais au début j'ai eu du mal à m'habituer au batteur, parce qu'il utilisait une piste avec un click pour jouer. Owen Hale était bien plus un batteur de studio, et il aimait utiliser une piste de click. Personnellement à cette époque je n'y faisais pas attention, mais je comprends pourquoi il le faisait.
RTJ : As-tu des titres écrits durant ta période dans Lynyrd Skynyrd qui ne sont jamais sortis et que l’on pourra voir dans Skinny Molly ?
Mike Estes : En fait, j'ai utilisé avec Skinny Molly quelques riffs qui étaient au départ prévus pour être des morceaux de Skynyrd. "Here for a Good Time" et "Girls Like You" sont deux riffs que j'ai écrits et sur lesquels Skynyrd a ensuite fait le bœuf. Gary aimait ce riff que j'avais et qui s'est retrouvé à devenir "Here For A Good Time"… Voyons…"Too Much" et "When The Goin' Gets Tough The Tough Go Fishin' " sont deux de plus auxquels je pense. J'ai conservé toutes les cassettes de démos sur lesquelles j'ai ensuite pris l'habitude de revenir et je suis vraiment content de l'avoir fait.
RTJ : As-tu eu l’occasion de voir Lynyrd Skynyrd en concert cette année ou d’écouter le CD One More for The Fans ? Si oui, qu'en penses-tu ?
Mike Estes : Non, si j'écoute aujourd'hui Skynyrd, c'est le groupe original. Sauf si je me sens d’humeur à écouter un enregistrement sur lequel je suis, ce qui n’arrive mettons qu’environ une fois tous les deux ans. Je ne les ai pas vus jouer live depuis mon départ.
RTJ : J’aimerais revenir sur ce que tu as fait entre Lynyrd et Skinny Molly, peux-tu nous en dire plus sur Drivin’ Sideways ? J’adore ce disque. Comment avait-il été composé ?
Mike Estes : J'ai écrit beaucoup de morceaux avec mon ami Paul Abraham. Il était le road manager de Skynyrd. Nous aimions tous les deux la NASCAR et nous avons pensé que nous devions essayer d'en faire un disque. C'était vraiment un bon groupe, je pense.
RTJ : Le disque sera-t-il ressorti pour que tes nouveaux fans puissent le trouver sur CD BABY ?
Mike Estes : Probablement pas. C'est obsolète tout autant que le line-up des pilotes NASCAR.
RTJ : Tu as aussi eu un projet plus country rock appelé BRAVE NEW SOUTH, avec un disque qui est sorti, comment cela s’est-il passé ? Peux-tu nous en dire plus sur ce projet ?
Mike Estes : Pour moi c'est le meilleur disque que j'aie jamais fait. Il y a dessus quelques uns de mes morceaux favoris. "No Present Like The Time" est probablement un de mes sommets, au niveau des paroles. Le disque a plutôt bien marché en Scandinavie quand il est sorti, à l'époque en 2001. On m'a raconté que la maison de disques en avait récemment fait un genre de réédition.
RTJ : Tu as eu aussi un projet Horsetraderz, un disque est paru, peux-tu nous dire qui était avec toi et comment vous aviez composé ce projet acoustique ?
Mike Estes : En gros, Horsetraders était une excuse pour Pontus (Pontus J Back, NdT.) et moi de tourner. A cette époque, c'était beaucoup de plaisir, mais les choses ont mal tourné avec Pontus pendant un moment parce qu'il buvait continuellement et s'est foutu dans des problèmes d'argent avec beaucoup de gens. Depuis, il a trouvé Dieu et j'espère que ça va bien pour lui.
RTJ : Pour nos lecteurs, peux-tu nous rappeler comment SKINNY MOLLY a été créé en 2004
et le pourquoi du choix de ce nom ?
Mike Estes : Bon, Dave Hlubeck m'a appelé un jour en 2003 et a dit "Hey, Mikee, je cherche une date. Sais-tu si quelqu'un cherche un guitariste ?" Je savais que Dave avait depuis peu quitté SRA (Southern Rock Allstars, NdT.) puisque j'avais aussi joué avec SRA, mais j'avais quitté juste avant que Dave ne le fasse juste pour me concentrer sur Brave New South. Techniquement, Dave a rejoint Brave New South pendant environ un an. Puis Pontus Back a eu vent que Dave et moi jouions ensemble et a demandé si nous aimerions faire une tournée avec lui. Juste une tournée dans l'été de la Scandinavie. J'ai dit "Sûrement. Nous allons le faire. On va appeler ça Skinny Molly". C'était un jeu sur les noms de nos précédents groupes à Dave et moi. (En fait il y a un double jeu, pas seulement avec les noms des groupes car Skinny Molly veut aussi dire “Molly toute nue” ou “Molly à poil”, typique de l'humour de Mike, NdT.). Ça a vraiment bien marché alors nous avons décidé de prolonger l'expérience. Nous jouions principalement des reprises de morceaux de Skynyrd et Hatchet. Mais j'ai alors dit : "Si nous sommes partis pour continuer sous ce nom, nous devons écrire des trucs originaux. Je ne veux être dans un groupe-hommage d'aucune sorte." Nous avons commencé à écrire, mais Dave est revenu dans Hatchet, et Kurt et moi avons continué de rechercher les bons mecs pour monter un groupe qui pourrait faire du bon matériel original. Nous avons finalement eu Chris Walker à la guitare, et puis Luke Bradshaw est venu à la basse. Chris est vraiment un bon guitariste, mais il ne pouvait vraiment pas se consacrer à la route en raison du fait qu'il avait la garde de deux gamins. Ce groupe est un groupe pour prendre la route, donc on a eu à prendre quelqu'un d'autre.
RTJ : Jay Johnson lui a succédé, peux-tu nous donner des nouvelles de sa santé suite à son remplacement
lors de la dernière tournée européenne ?
Le choix de Jay Johnson a-t-il été naturel ? Depuis quand vous connaissez-vous ?
Mike Estes : Jay va parfaitement bien maintenant et s'est remis en selle avec nous, et il sera en tournée avec nous cet été et pour le reste de l'année, et pour aussi longtemps qu'il voudra le faire. Jay et moi nous sommes rencontrés à la Rupp Arena à Lexington, Kentucky sur le Skynyrd Tribute Tour en 1987. En fait, j'étais présent avec Skynyrd ce soir-là. Depuis nous avons fait connaissance et joué des tonnes de shows ensemble alors il lui a semblé totalement naturel d'être dans ce groupe. Il a été le premier mec que j'ai appelé.
RTJ : Si tu devrais définir la musique de SKINNY MOLLY aujourd’hui, comment la présenterais-tu ?
Mike Estes : Rock sudiste. Nous brandissons le drapeau, et c'est notre truc depuis 2004.
RTJ : Je voudrais revenir sur votre dernier disque, il commence par le morceau donnant son nom à l’album, « Here for a Good Time », un classique rock sudiste mid-tempo et deux solides guitares, cela est-il une bonne définition de la musique SKINNY MOLLY ?
Mike Estes : Je dirais oui, certainement ! Le premier disque que nous avons fait était assez sombre, le second disque était un peu plus dur, et le troisième, par manque d'un meilleur mot, pourrait être un poil plus "country". Il y est plus question de bon temps… bien qu'il y ait quelques morceaux sombres dessus, comme "Ride" que j'aime vraiment. Actuellement, ce groupe totalement orienté vers la perspective d'avoir du bon temps, pourtant.
RTJ : On continue avec « For Y`All », un sympathique morceau country dans lequel tu déclares que ce n’est pas la peine de brûler des bougies à ta mémoire, que tu as eu une bonne vie et que cette chanson est pour tes vrais amis qui t’ont suivi jusqu’à la fin (« Don’t burn candles in my memory, I’ve lived a good life. Lord knows I’ve had a ball, and for my true friends up to the end this one’s for you all »). Cela pourrait carrément servir d’épitaphe sur une pierre tombale. En tout cas, c’est un bon résumé de la vie d’un musicien. Avais-tu un message à faire passer ?
Mike Estes : Et bien, oui, j'en avais un. Je suis heureux que tu l'aies repéré… Pendant que j'écrivais des chansons pour le CD "Here For A Good Time", je me suis mis à penser que ça pourrait être le dernier disque sur lequel j'allais jamais jouer. A tout jamais. Le milieu des affaires en musique est devenu très difficile et tourner est devenu très difficile et c'est une entreprise très coûteuse et très fatigante. J'ai pensé que je pourrais juste me lancer dans l'écriture et la production pour d'autres groupes, et arrêter la route. Je n'ai plus 20 ans, et à cette époque nous étions en affaire avec des agents et des promoteurs qui me mettaient dans un état pitoyable et à un moment j'en ai perdu le sommeil pendant deux mois sur la route… cela m'éreintait. Donc, j'ai pensé que je devais écrire une chanson du fond du cœur pour les fans. Une sorte de "Si je meurs aujourd'hui, demain, ou n'importe quand, merci d'avoir aimé mes chansons et d'être venus nous voir jouer durant toutes ces années, je vous en SUIS vraiment reconnaissant". C'est ce qu'il y avait dans mon esprit ou mon message, pour ainsi dire. On ne sait jamais ce qui peut arriver dans la vie, ou quand. J'ai juste voulu que les gens qui ont apprécié mes chansons au fil des années sachent combien je leur suis reconnaissant de leur soutien. Si tout cela s'arrête demain, merci pour ce sacré parcours! Maintenant, nous avons un nouvel agent au Royaume-Uni, et un nouveau manager aux USA. Nous avons joué dans des shows bien plus grands chez nous cette année, y compris le "Rock the South" Festival qui est un gros show, c'était super pour le groupe, et ça nous a amené beaucoup de nouveaux fans. Alors, maintenant, après 12 ans à faire du Skinny Molly, je suis juste en train de continuer à le faire indéfiniment!
RTJ : « When The Goin´ Gets Tough, The Tough Go Fishin´ » figurait sur l’album de Brave New South, c’est un « southern honky-tonk » avec un solo de guitare “redneck”, pourquoi avoir repris ce titre, et en as-tu changé
quelque chose ?
Mike Estes : Je n'y ai pas vraiment changé beaucoup de choses… J'ai juste compté sur le fait que les mecs de Skinny Molly joueraient sur la nouvelle version et que ça la ferait sonner comme Skinny Molly, ce qui je pense a été le cas. La raison pour laquelle j'ai choisi de la réenregistrer est parce que nous la jouions beaucoup live, et ça passait vraiment bien avec le public. Alors, j'ai pensé que nous devrions l'enregistrer.
RTJ : « Make It Easy » est un « Southern Blues » jazzy et lancinant co-signé par Ed King. On reconnaît immédiatement la slide inimitable de notre bon vieux Ed, quand ce titre a-t-il été composé ?
Mike Estes : Je pense que c'était en 1993… Je me suis pointé avec ce riff en tête… Je ne pouvais même pas le jouer après l'avoir entendu en moi… Je me suis entraîné et entraîné jusqu'à ce que je puisse le jouer, et ensuite je l'ai montré à Ed. Il m'a dit qu'il l'aimait, alors j'ai écrit des paroles pour, et il a arrangé ça. Au départ, c'était conçu pour une chanteuse.
RTJ : Ed King doit avoir des tas de titres composés depuis 20 ans, ne pourriez-vous pas composer un album à l’ancienne, enregistré avec un chanteur dans la veine de Skynyrd ?
Mike Estes : Je n'aimerais rien de plus que de faire ça avec lui, honnêtement. Je suis sûr qu'entre Ed et moi nous pouvons créer les chansons. Il me dit actuellement qu'il est en retraite, mais il ne veut pourtant et seulement ressortir que pour enregistrer ou jouer à l'occasion. J'ai de la chance qu'il m'ait confié qu'il jouerait au moins sur une ou deux chansons de n'importe lequel de mes disques. Avec un peu de chance, lui et moi pouvons écrire quelque chose de neuf pour un CD de Skinny Molly dans le futur, au moins.
RTJ : « Girls Like You » est un rock au tempo médium avec duel de guitares,
comment vous répartissez-vous les solos avec Jay ?
Mike Estes : Celui-là a été vraiment amusant à enregistrer. Nous avons trouvé les solos sur place, ce qui est quelque chose de contraire à mes habitudes. Normalement j'écris chacun de mes solos dans ma tête ensuite je les apprends. De cette manière, mon jeu de guitare ne se met pas dans le passage de mes solos (RIRES) mais sérieusement, j'aime d'abord entendre quelque chose dans ma tête, puis le jouer. Mais sur cette chanson, Jay et moi avons juste laissé aller pour le plaisir, parce que la chanson est amusante et que nous voulions avoir du plaisir à la jouer.
RTJ : SKINNY MOLLY tourne régulièrement en Europe, penses-tu que le groupe a plus de succès
ici qu’aux USA aujourd’hui ?
Mike Estes : Je devrais dire oui, mais je pense que c'est en train de changer. Cette année le groupe a été plus reconnu ici que jamais auparavant et nous avons joué de plus grands shows ici qu'en Europe. Mais, ceci dit, cet été en Europe nous allons aussi faire quelques shows plutôt importants. Pourtant, la taille des shows n'a vraiment aucune importance pour moi, tant que nous continuerons à jouer, ce sera OK. Je pense vraiment, de toutes façons, que le groupe a fait ses classes, et les mecs qui sont là-dedans méritent de se faire une vie décente en jouant de la musique. C'est ce que nous faisons finalement. Personne dans ce groupe n'accorde d'attention au fait de devenir célèbre… ce serait fatal… nous faisons seulement attention à ce qui peut nous faire continuer ce que nous faisons.
RTJ : Jay Johnson a dû laisser sa place lors de la tournée en novembre et décembre 2015 en Europe, comment s’est passé son remplacement avec Manu de Natchez et Pavel Marcel ?
Mike Estes : Tous les deux Manu et Pavel ont été SUPER en particulier en regard du délai qu'ils ont eu pour apprendre les morceaux. C'était une super expérience pour chacun d'entre nous, parce que tout le monde avait à se tenir prêt à n'importe quoi. Ces mecs jouent de façon totalement différente l'un de l'autre…Manu est plus un "southern player" que Pavel, mais les deux ont mis leurs touches personnelles sur nos chansons et j'ai vraiment aimé le temps avec chacun d'entre eux.
RTJ : J’ai vu des vidéos sur YouTube de Pavel et toi et vous semblez avoir toujours joué ensemble, comme des frères, un bon reflet de votre relation ?
Mike Estes : J'ai traîné avec Pavel depuis ma période dans Blackfoot, et lui et moi avons passé pas mal de temps ensemble sur la route avant cette dernière tournée, toujours en se marrant. Nous avons le même sens de l'humour délirant et nous avons exactement les mêmes opinions politiques, alors nous avons beaucoup de choses à nous raconter. Il est le Mike Estes tchèque, sauf qu'il est un meilleur guitariste que Mike, mais un moins bon parolier. (RIRES)
RTJ : Y a-t-il une différence entre le public européen et aux USA ?
Mike Estes : Je ne pense pas que le public soit si différent que ça. Je PENSE pourtant vraiment que les Européens accordent plus de valeur à la musique que les Américains. Beaucoup d'Américains sont devenus trop préoccupés par leurs "vies Facebook" pour prêter plus que ça attention à la musique désormais. Ils pensent que la musique devrait être gratuite et que vous devriez vous arrêter chez eux pour faire un concert, de manière à ce qu'ils n'aient pas à conduire, et gratuitement aussi. (RIRES) J'exagère probablement, parce que nous AVONS quelques fans américains inconditionnels. Mais les fans du continent en Europe font beaucoup de trajets au volant quand ils veulent voir un concert, et beaucoup d'Américains ne le feront plus. Ils sont trop occupés à compter les "likes" sur leurs envois de photos de nourriture. (RIRES) Je plaisante, bien sûr.
RTJ : Penses-tu que tu enregistreras un jour un morceau avec Natchez en studio ?
Mike Estes : C'est un super groupe et je serais honoré de le faire. S'ils demandent, la réponse serait bien sûr oui* !
RTJ : Au cours de tes tournées, tu as croisé pas mal de groupes en Europe, y en a-t-il que tu écoutes ?
Mike Estes : Quelquefois! Si un groupe nous donne un CD à un show nous l'écoutons dans le bus.
Certains sont bons, certains pas aussi bons. (RIRES)
RTJ : Question s’adressant au guitariste : quel est ton matériel de prédilection actuellement
en studio et sur scène ?
Mike Estes : D'habitude j'utilise différentes sortes de Les Paul JR ou Les Paul Special… (Les Les Paul JR n'ont qu'un micro aigu, les Special ont deux micros, pouvant être soit du simple P90, soit du double bobinage, NdT.) Ma favorite est et a toujours été "Sugar", ma Les Paul JR 1959. J'ai aussi une JR '56, et une VOS JR '57 et VOS JR '58 (les deux en “blanc TV”) que j'utilise beaucoup (VOS : Very Old Sandpaper. ou Vintage Original Specs, finition à l'ancienne, comme si la guitare avait été parfaitement conservée depuis sa fabrication, avec des vernis moins brillants que les vernis actuels, NdT.).
Mon propre modèle de guitare va sortir cet été, un objet avec un look bien cool que j'ai concocté avec un luthier local là où j'habite. C'est un croisement entre une Telecaster, une Firebird, une Explorer, et une Les Paul JR. C'est du délire mais c'est marrant. Elles vont être faites à l'unité, ici dans le Tennessee.
Il y a juste une modification bénigne à trouver avec le cordier et nous serons sur le bon chemin. Je pourrais jouer sur le prototype lors de la tournée d’été européenne.
Pour les amplis, je peux jouer sur la plupart des Marshall ou des premiers Fender et faire que ça fonctionne. Je travaille avec un mec en Ecosse que mon ami Steward Denny a lancé sur la piste d’un ampli custom "plexi" type Marshall. Chez moi, j'utilise un Marshall JCM 800 avec des haut-parleurs Eminence, qui sont pour une part énorme dans mon son.
RTJ : Ta voix a changé en 20 ans, elle est rauque et veloutée quand il le faut, gorgée de soleil et de bourbon, et chatouille nos oreilles comme on aime en rock, comment l’as-tu travaillée ?
Mike Estes : Bon, j'ai probablement trop bu et fumé au cours des ans, mais ouais, elle a changé… Elle sonnait plus clair. J'ai appris plusieurs techniques de chant différentes quand j'étais dans Blackfoot, et en fait j'ai étendu ma tessiture quand j'étais dans ce groupe, pour chanter plus haut que je n'aurais jamais pensé en avoir la possibilité.
Je viens juste de résoudre comment le faire par moi-même, curieusement. Mais maintenant je peux m'en servir avec Skinny Molly, donc ça peut être une raison de l'évolution. Je suis heureux que tu aimes ça, Merci*!
RTJ : Où en est le projet Monsters of Southern Rock ?
Mike Estes : Je ne vais jamais m'opposer à aller jouer avec ces mecs. J'aime chacun d'entre eux tous. C'est juste un groupe très onéreux à embaucher car il y a tellement de trajets aériens impliqués. Pourtant j'aimerais en faire plus avec eux dans le futur !
RTJ : Quels sont les projets de SKINNY MOLLY pour le futur, CD, DVD à paraître, projet acoustique ?
Mike Estes : Le DVD "Live at the Shed" est sur notre site web. Il sera disponible en PAL cet été, j'en suis vraiment fier. C'est un VRAI live, au contraire de la plupart des DVDs musicaux qui sont sortis. Mon CD "solo" acoustique (qui n'est plus tellement acoustique) sortira à un moment ou un autre cette année. Je travaille dessus à mes heures perdues, ce dont je n'ai pas trop ces temps-ci. Il y aura un nouveau CD Skinny Molly l'an prochain. Probablement au début de l'été. Les CDs de Skinny Molly me prennent beaucoup de temps, parce que je me charge de l'essentiel de l'écriture. Je produis aussi et je fais même une partie de la technique. Je dois vraiment m'être mentalement préparé pour faire un CD de Skinny Molly, parce que je sais que je vais y consacrer un an de ma vie.
RTJ : Dernière et traditionnelle question, si tu devais rester sur une île déserte, quels sont les cinq disques que tu emmènerais avec toi ?
Mike Estes : Cette liste change quotidiennement en ce qui me concerne… aujourd'hui la liste serait:
"Stripped"- Rolling Stones
"Guitar Town"- Steve Earle
"Bad Co."- Bad Company
"Step Inside This House"- Lyle Lovett
"Cracked Rear View"- Townes VanZandt
*En français dans le texte
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